Nuttea - Interview 2002


Vous pensez quoi de l’évolution des sound system en France? Est-ce que vous allez vous même vous y produire?

Bah y a de plus en plus de sound system dans chaque ville où on va on voit qu’il y a des sound system en fait ; au début on était un groupuscule à Paris, 88, 89, 90, on avait l’impression d’être une secte, on faisait un sound system y avait 400 personnes mais c’était sur tous les tunes qu'ils réagissaient … maintenant ça se diffuse un peu partout tu vois y a de plus en plus de groupuscules comme ça qui naissent dans chaque ville, mais ça reste des groupuscules tu vois ce que je veux dire ; le reggae il a toujours évolué comme ça, il est partout sur la terre : tu vas en Colombie y a des groupes de reggae Colombiens, tu vas au Venezuela y a des groupes de reggae, partout dans le monde, au Japon, en Australie tu vois ; le reggae ne domine aucun de ces pays là mais il est partout en même temps, c’est ça qui fait sa force. Donc c’est la même évolution en miniature en France, ça s’implante de partout, y a des sound system de partout dans toutes les villes et puis au bout d’un moment il va y avoir une vie quoi tu vois ce que je veux dire, c’est inexorable, je disais tout à l’heure c’est comme un enfant qui grandit, tu peux pas arrêter la croissance d’un enfant tu vois, donc ça évolue, ça grandit voilà ; nous même on kiffait des artistes et y a des artistes qui nous kiffent, qui commencent maintenant à DJ ou à chanter et puis qui vont perpétuer le truc.

Est-ce que tu pense que en France le Reggae Music dans son ensemble a le même potentiel que la techno ou le rap du point de vue de la reconnaissance du public?

Non non je pense pas que ça ait le même potentiel, mais en même temps c’est un peu normal, parce que bon le reggae c’est une musique qui vient des Caraïbes, qui vient des Antilles, qui a été faite sous le soleil, transposé en France c’est difficile, moi je vois pas Germaine femme de ménage écouter Buju Banton, où alors faudrait vraiment beaucoup d’années qui s’écoulent.

Elle écoute Poom poom short déjà !

Ouais possible, pas forcément, mais c’est possible. Donc le reggae ça reste encore un truc de passionnés, de gens qui aiment ça, et qui ont compris la vibe, qui ont quand même un petit attachement aux Caraïbes, y a quand même une forte connotation Caraïbe dans le Reggae qui correspond pas forcément à l’ambiance parisienne ou française ; donc, non, le potentiel du reggae en France c’est pas le même que la techno, tu vois la techno c’est une musique allemande, européenne qui correspond à l’environnement et à la mentalité des gens quoi, tu vois, c’est bien de faire un tube, mais les gens qui aiment le reggae ils sont encore très peu quand même, tu vois faut pas se leurrer, y a des trucs qui marchent, y a des groupes qui arrivent à rentrer dans les charts tout ça, mais ça veut pas dire que les gens connaissent le reggae, c’est un début ; maintenant espérons qu’on va servir aux générations futures à faire grandir le truc.
Personnellement j'ai pas dans l’espoir que tout le monde écoute du reggae en France ça serait stupide, ce qui manque se sont des structures qui existent déjà, des structures sérieuses, du jenhar, des gens qui investissent et qui font des projets concrets comme par exemple le Dance Hall Fever ; c’est un projet qu’on aurait peut être pas pu faire il y a quelques années et que maintenant on peut faire et voilà quoi tu vois ce que je veux dire, on y va, parce qu'il y a un peu plus de moyens, on peut tourner avec un band, faire plusieurs villes, on a un bus…

Donc c’est vraiment poser une fondation dans le reggae en France ?

C’est clair toute histoire a une fondation, toute culture a une fondation.
Si tu vas a New York ou à Londres y a des gens qui vivent tous les jours du reggae, sans être des stars mais ils sont salariés du reggae ; ils sont standardistes dans un studio qui fait que du reggae ou ils sont ingés…ils vivent du reggae, tous les jours sans être forcément sur le devant de la scène, c’est à partir de ce moment là que ça devient intéressant, que toi par exemple en tant que journaliste de reggae tu puisse en vivre, là tu peux dire que le reggae est installé, que ta fille de 18 ans qui cherche du boulot elle se retrouve à travailler en tant que standardiste à prendre des rendez-vous dans un studio qui fait que du reggae, t’imagine le truc, quand on en sera à ce niveau là ça sera autre chose, pour l’instant on fait des trucs à droite à gauche, c’est les balbutiements.

Y a des vinyles, des 45 tours en sortie pour bientôt ?

Ouais mais ouais ça c’est inévitable ; tu sais il y a tellement de riddims qui sortent en JA , t’as toujours envie de poser une voix, tant que la vibe est là t’as envie.

Stand Tall, ça en est où ?

Là ils sont en train de monter un site ; c’est plus Polino, Tip Top et Kaza qui s’occupent de ça ; voilà, une émission de radio sur Génération, sur Paris 88.2 ; je crois qu’ils continuent à faire des sound systems mais ils tournent plus en province en fait qu’à Paris, en Belgique, en Suisse je crois qu’ils vont souvent là-bas ; et puis ils peuvent se diviser, Polino il peut jouer à un endroit sous le nom de Stand Tall et Kaza un autre sous le nom de Stand Tall aussi.

Y a eu besoin de préciser à un moment que vous vous différenciez du Hip Hop, est-ce que vous avez un mot à dire sur le fait qu’on arrive à confondre ?

Non mais ça c’est un manque de culture musicale, faut pas se prendre la tête, faut pas se monter le bourrichon, c’est que les gens ils connaissent pas, maintenant ils entendent un mec faire « Wablablabla » et pour eux c’est du Rap, tu vois ce que je veux dire ; Ginette femme de ménage elle calcule pas, elle fait pas la différence. C’est aussi simple que ça, faut pas chercher midi à quatorze heures ; c’est ce que je disais tout à l’heure, le reggae c’est pas ce qui correspond vraiment à la mentalité française, c’est un truc ou dans ta tête t’es détendu, les parisiens ils sont pas détendus tu vois ce que je veux dire, donc il y a clash, y a problème.
Mais le Hip Hop il a plus sa place à Paris, parce que c’est né à New York, dans un climat qui correspond plus au climat parisien, donc c’est normal que ça ait pris, comme c’est normal que le reggae ait pris en Martinique en Gwadelup et en Guyane aussi parce que c’est facilement transposable.

Mais vous vous avez grandi à Paris, c’est difficile les relations avec la capitale apparemment ?

Les relations avec la capitale ouais parce que Paris c’est quand même une ville de bourgeois où il faut avoir des tunes, y a pas de juste milieu à Paris, c’est soit tu galère soit t’as des tunes ; celui qui a pas beaucoup de tunes il galère, y a pas de différence à Paris entre pas beaucoup de tunes et pas de tunes du tout ; donc Paris c’est une ville de bourgeois, ils sont en train de nettoyer Paris, ils sont en train d’augmenter le prix des loyers pour que ça soit que des bourgeois qui puissent avoir accès à Paris ; et bientôt ils voudront que des propriétaires, donc Paris c’est pas une ville qui nous pousse, qui nous soutient, on est tout le temps en conflit avec cte ville ; c’est pas une ville qui est réellement accueillante comme on essaie de le faire croire, elle est accueillante quand il y a du jenhar à prendre tu vois, quand c’est pour accueillir les touristes c’est cool mais quand c’est pour traiter de manière humaine des gens qui viennent travailler sur leur territoire c’est autre chose.

Heureusement qu’il y a maintenant aussi beaucoup de structures en province

Le reggae il vit beaucoup plus en province qu’à Paris pour être franc ; en province y a un public pour le reggae, à Paris y a un public changeant, un public lunatique ; mais bon ; le bon son c’est le bon son, partout où t’es, si ça pète ça pète tu vois

Est-ce que vous avez des projets pour après le tour, faire des choses ensemble ?

Ouais peut être un album, ça reste ouvert encore à ce niveau là, peut être un morceau déjà ; faut voir, tu sais on a pas envie de travailler sous la pression d’une maison de disques « faut faire ci, faut faire ça maintenant, faut que ça soit livré telle date, on est là le morceau il sortira quand on aura envie.

Vous pensez que les dates vont être aussi chaudes que ce soir ?

Ah ouais mais je pense que ça va monter en puissance.

Toi même tu écoute d’autres musiques ?

Ouais ouais j’kiffe la Soul, j’kiffe le Funk, mais le funk sauvage, Ohio Players, des trucs comme ça je kiffe, Isley Brothers (??) plein de styles de musiques, Al Green, Stevie Wonder, Miles Davis, Jimmy Hendrix, je kiffe plein de trucs en fait.

Tu as grandi avec ce son là aussi ?

Ouais ouais j’ai grandi avec ça, avec les Beatles, Carlos Santana, Louis Amstrong, avec de la Begin aussi.

Tous ça a inspiré ton travail ?

Ouais tout ça ç’a a inspiré mon travail, ça m’inspire plus maintenant qu’avant paradoxalement tu vois, ça ressort plus maintenant.

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